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  • Photo du rédacteurCatherine Regnier

Effet Dunning-Krüger : entre excès de confiance et manque de compétence

Dernière mise à jour : 25 nov. 2021


Imaginez-vous braquer une banque, la tête enduite de jus de citron, persuadé(e) que votre succédané d'encre sympathique vous rendra invisible !

C'est ce que McArthur Weeler a fait, en 1995, à Pittsburgh, Pennsylvanie, avant d'être arrêté le soir-même, confondu à sa plus grande surprise par les vidéos de surveillance...


Cette anecdote étonnante est à l'origine de que l'on appelle l'effet Dunning-Kruger, autrement nommé effet de surconfiance.


Un tel biais cognitif consiste en une erreur de jugement où nous avons tendance à présenter les comportements suivants :

  • surestimer nos compétences alors qu'on présente un niveau inadéquat dans un domaine établi,

  • et, inversement, sous-estimer nos compétences alors même qu'elles sont au delà des attendus pour une tâche donnée par exemple. [voir mon article sur le syndrome de l'imposteur pour cet autre versant de l'effet Dunning Krüger]


Ces travers, nous pouvons tous les présenter à tel ou tel moment de notre vie.

Certaines personnes vont favoriser un comportement plutôt que l'autre, par exemple surestimer leurs compétences ou se dénigrer alors qu'elles ont un talent manifeste pour un domaine.


Il s'agit d'un mécanisme inconscient où notre cerveau donne une illusion de supériorité en évaluant à tort notre propre compétence au-dessus des attendus, et vice-versa.


"Le problème avec le monde, c'est que les gens intelligents sont pleins de doutes tandis que les plus stupides sont pleins de confiance", Charles Bukowski


Mise en évidence de l'effet Dunning-Krüger


Ce biais cognitif a été démontré dans les travaux de deux chercheurs, David Dunning et Justin Kruger, publiés en 1999.

En effet, leurs études ont mis en lumière qu'une personne qui n'a pas un niveau de compétence suffisant dans un domaine fixé :

  • tend à surestimer son niveau de compétence,

  • ne parvient pas non plus à reconnaître la compétence de ceux qui la possèdent ,

  • ne se rend pas compte de son degré d'incompétence...


Heureusement, tout n'est pas perdu !


Un entraînement adapté peut nous mener à une amélioration significative de notre compétence.


Ensuite, et rétrospectivement, nous pouvons prendre conscience de nos lacunes antérieures et les accepter.

Il est à noter que ces études ont été principalement réalisées sur des sujets occidentaux. Une étude conduite sur des sujets d'Asie orientale laisse entendre, dans ce cas, un effet inverse.


D'où nous vient cette erreur de jugement ?


Les psychologues Dunning et Kruger attribuent ce biais à une difficulté métacognitive qui nous empêche de reconnaître exactement nos incompétences et d’évaluer nos réelles capacités.

« Les personnes manquant des connaissances ou de la sagesse leur permettant d’être performantes sont souvent peu conscientes de cela.
Cette absence de prise de conscience est attribuée à un déficit en compétences méta-cognitives.
Autrement dit, l’incompétence qui les mène à faire de mauvais choix est celle-là même qui les prive de la capacité à reconnaître la compétence, que ce soit la leur ou celle de toute autre personne. », Dunning et Kruger

Pour reformuler, quand nous manquons de compétence dans un domaine donné, nous n'avons logiquement pas les capacités de nous rendre compte de notre incompétence sur ce sujet...


Et inversement !


Nous pouvons nous montrer très qualifiés sur un sujet, tout en ayant tendance à sous-estimer notre niveau de compétence et croire à tort que des tâches simples à nos yeux le sont aussi pour les autres.


Quelque part, je trouve ce processus cognitif cohérent. Chacun part du seul référentiel qu'il connaît, c'est-à-dire lui-même….

Ce qui explique que les personnes hautement compétentes pensent inconsciemment que tout le monde a ce même niveau dans le domaine en question...

et que ceux qui n'ont pas assez de compétences sur tel ou tel sujet se surestiment parfois très largement…

Encore un travers de notre cerveau décidément bien retors !

"L'ignorance engendre plus souvent la confiance que ne le fait la connaissance.", Charles Darwin


Un effet parfois lourd de conséquences


Dans le monde professionnel, cela peut donner lieu à des situations telles que :

  • promotions ou augmentations de salaire injustifiées,

  • leadership ou management qui surestime son niveau de compétence et inapte à juger les compétences de ses collaborateurs,

  • travail en groupe compliqué en mixant personnes non qualifiées et qualifiées pour des tâches données...


En effet, selon une étude de l’université de Melbourne, les personnes qui ont le plus confiance en elles obtiennent de meilleurs salaires et sont promues plus rapidement que les autres.


Ainsi, un manager ou un recruteur aura plus de facilité à :

  • accorder sa confiance à quelqu’un d’ignorant mais qui montre une certaine confiance en lui, rendant son ascension hiérarchique plus aisée,

  • alors que quelqu’un de plus compétent qui se sous-estime se verra plus couramment relégué au second plan.


Si vous voulez rire quelques instants, je vous invite à savourer cet excellent TedX de Tomas Chamorro-Premuzic, célèbre psychologue des organisations : Why do so many incompetent men become leaders?




Evidemment, le monde du travail n'est pas le seul impacté, et les exemples de tels comportements existent aussi bien au niveau politique que sociétal.


Moralité


Je pense que tout un chacun peut être confronté à ce biais, que ce soit dans un sens ou l'autre.


Le type de personnalité me semble toutefois assez lié à un comportement plutôt qu'un autre, c'est à dire une propension à douter régulièrement de soi et sous-estimer ses compétences, ou à l'inverse, montrer un excès de confiance.


J'aurai tendance à croire que les personnes qui souffrent d'un manque d'estime d'elles mêmes pourraient plus facilement se dévaluer, ce qui est mon cas dans de nombreuses situations cf. précédent article sur le syndrome de l'imposteur.

Mais, en même temps, ce manque d'estime de soi peut aussi bien mener à des comportements inverses, en se "cachant" derrière une assurance excessive.


En définitive, ce qui me paraît important est d'acquérir la capacité de nous évaluer avec honnêteté et réalisme (les métacognitions mentionnées ci-dessus).


Donc, faire preuve de discernement envers nous-même (ce qui n'est pas toujours facile !)


En prenant conscience de nos atouts et des compétences que nous avons besoin d'améliorer pour assumer pleinement une tâche, nous pouvons engager une démarche d'amélioration ou d'apprentis-Sage ou même de délégation de certains tâches à d'autres admis comme étant plus aptes à les mener à bien.


Nous pouvons également réaliser à quel point certaines croyances limitantes comme" j'ai tout compris à ce sujet et on n'a plus rien à m'apprendre", ou "je ne sais rien" peuvent nous "fermer" à certains savoirs.


Car c'est en connaissant nos propres limites que nous pouvons les dépasser, et élargir notre conscience.



Explications vidéo de l'effet Dunning-Krüger


Plus encore


Autour du syndrome de Dunning Kruger



Sur les biais et distorsions de notre cerveau


Psychologie sociale et comportements (parfois hallucinants...)

Ainsi que tous mes autres articles autour de la Psycho ici

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 Photo du post Fondue de neige...24 janvier 2021 - Catherine Régnier
Photo du post Fondue de neige...24 janvier 2021 - Catherine Régnier

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